Je ne résiste pas à vous faire copie de cet article de Raymond Milot, repéré par Laurent sur le site de Médiapart. Que c'est bon d'enfin lire un écrit cohérent et intelligent sur le sujet!
RYTHMES SCOLAIRES : SEPT CONSTATS AFFLIGES
Trop, c’est trop. La préparation d’une grève des enseignants le 14 novembre me conduit à faire ces constats qui dépassent ses enjeux et devraient interpeller parents et enseignants.
Premier constat : Heureuse surprise ?
Quand Darcos a établi la semaine de 4 jours, il n’a été question ni de grève des enseignants, ni de manifestation des parents obligés de garder leurs enfants, ni d’exigence de dispositifs de garde ou d’animation. La sensibilité syndicale à « la fatigue », à « l’anxiété », au « déboussolement» des enfants, aux difficultés des parents qui travaillent et qui ne partent pas en week-end, ne s’est pas beaucoup exprimée. Les médias n’ont pas enquêté.
Deuxième constat : Capacité d’attention…
Déjà, en 1938 Dr Clément Launay, Médecin des hôpitaux, Médecin inspecteur des Écoles de la Seine considérait que : « la capacité d'attention chez les enfants de 6 à 13 ans ne dépasse pas 2 heures par jour, à 6 et 7 ans, et 4 à 5 heures par jour à 12 et 13 ans … » Opinion partagée au fil des ans par personnalités prestigieuses Langevin, Wallon, Debré, Vermeil, Prost, Montagner …
La réforme Peillon peut sembler dérisoire au regard des véritables besoins. On voit pourtant ce qu’elle déclenche (et ce qu’elle a déclenché quand a été évoquée la durée des vacances estivales !).
Troisième constat : Fatigue…
Dès le CP, journée de 6 heures et devoirs parfois considérables, en dépit de l’interdiction motivée datant de 1956 et réitérée régulièrement par des circulaires jusqu’en 1971. Celle de 1994 précise : « des études dirigées d’une durée quotidienne de 30 minutes sont mises en place dans chaque classe pendant le temps scolaire » et n’est pas plus respectée.
Désobéissance des enseignants, complicité des Inspecteurs qui devraient faire respecter loi et circulaires. Complicité involontaire des associations qui organisent « l’aide aux devoirs ». Bien souvent, énervement des parents qui ajoute à la fatigue.
Quatrième constat : Inégalité…
Tous les parents ne sont pas en mesure d’apporter une aide à leur enfant, pour des raisons culturelles et/ou matérielles. Les enseignants et leurs inspecteurs ne peuvent ignorer ce fait. Dans un rapport de 1994, l’Inspection Générale elle-même s’interroge : (les devoirs à la maison), « Facteur de réussite ou d’échec, liés aux conditions familiales, ne seraient-il pas une source d’inégalité devant l’école…un facteur limitant sa démocratisation ». Les sociologues Dubet et Duru Bellat sont plus affirmatifs : « l’école amplifie l’inégalité sociale ».
On s’en était accommodé jusqu’ici. Mais l’on se préoccupe aujourd’hui du « risque que cette réforme accroisse les inégalités » que vont connaître les enfants dans le temps périscolaire selon qu’ils seront dans une ville riche ou un petit village.
Cinquième constat : Serments oubliés…
41 associations dont les syndicats enseignants FSU, SNUipp, UNSA, SGEN ont signé l’Appel de Bobigny. 18 propositions dont la 7ème qui a trait aux rythmes scolaires, aux projets éducatifs de territoire (PEDT) et se terminait sur la nécessité de « dépasser les conflits d’intérêt » (!)
Les grèves et manifestations diverses témoignent que les élans progressistes qui naissent dans l’opposition, s’évanouissent dès le début d’un commencement de réalisation. Au lieu de chercher des solutions aux difficultés (réelles et surmontables) que rencontre un projet que l’on approuvait, on dénonce « le bricolage » et l’on déclare que « la situation est explosive ». On en profite pour oublier les 17 autres propositions.
Sixième constat : Décentralisation…
Une grave menace pèse sur l’école - centralisatrice - de Jules Ferry, cf. ces propos syndicaux : « Pensez-vous sérieusement qu’un maire puisse commander une organisation scolaire contre l’avis des enseignants ?, contre les parents ? » pire encore le risque de voir « glisser les missions d’enseignement de l’Éducation nationale vers les communes(…) de créer une confusion entre scolaire et périscolaire (locaux, activités) ».
Bref, ce « décret » « va à l’encontre de l’intérêt des enfants et de celui de l’ensemble des acteurs concernés ».
Oublié Jaurès qui craignait que les écoles subissent « l’arrogante tutelle de l’État ».
Une nouvelle grève prévue pour le 14 novembre entend obtenir « l’abrogation du décret ». Refalo et les enseignants-désobéisseurs auraient aimé, du temps de Sarkozy, provoquer une telle mobilisation. Refalo, lui, prenait des risques.
Septième constat : Ras le bol…
On avait déjà le ras le bol des impôts. On a maintenant le ras le bol des syndicats enseignants, le ras le bol du trottoir où les micros se tendent avec délectation, le ras le bol des Bonnets Rouges (et de leurs cochons sans doute), le ras le bol du MEDEF, des footballeurs, etc.
Tous s’ajoutent et fabriquent eux-mêmes « la vague F.N »