Dès que j'entends, que je lis des commentaires sur la réforme des rythmes de l'enfant à l'école, réforme initiée par Vincent Peillon, mon sang ne fait qu'un tour!
A mon avis, le seul argument qui ne soit pas irrecevable est celui qui fait état d'un manque d'intervenants aptes à un encadrement éducatif de qualité. Mais la qualification en terme de diplômes n'est pas nécessaire, je connais de bonnes volontés, des personnes non diplômées qui ont des compétences et qui œuvrent déjà dans le domaine de l'animation de moments partagés avec les enfants. Néanmoins, engageons alors les initiatives dans le domaine de la formation, recensons les moyens dont disposent déjà les territoires, nous verrons que des solutions qu'on ne soupçonne pas de prime abord existent, mutualisons et partageons.
Mais quand les élus s'arc-boutent sur un seul schéma d'organisation pour décréter que c'est impossible, alors là je m'insurge. Car on entend partout qu'assurer l'encadrement des enfants de 15h30 ou 45 à 16h30 ne permet pas de trouver du personnel pour trois quarts d'heure par jour, cela devient un peu lassant.
Qui a décrété que c'était trois quarts d'heure par jour en fin d'après-midi? Rien dans les mots du décret ne le laisse entendre.
Pour remettre quelque peu les pendules à l'heure, il faut répéter que toute latitude dans l'organisation de la semaine est possible, dans le cadre fixé par le décret.
Quel est-il ce cadre? Une semaine de 24h00 sur cinq demi-journées qui ne peuvent excéder chacune trois heures trente, le tout lié à une pause méridienne qui doit être d'une heure trente minimum.
A partir de ces principes simples, tout est permis.
Les schémas proposés en exemple dans le fascicule transmis aux collectivités et aux écoles ne sont que des exemples. Et comme chacun sait, un exemple ne reste qu'un exemple. Mais bien sûr, le plus simple est sorti comme argument de combat!
Alors oui, il faudra revoir les habitudes, oui il faudra revoir les pratiques, oui le temps de l'enfant devient une "priorité" partagée. Oui, il faudra sûrement réunir les bonnes volontés pour que ce temps soit intelligemment organisé.
Prendre en compte également que la première heure de l'après-midi n'est guère propice aux apprentissages, tout le monde le constate et j'en sais quelque chose dans ce domaine, ayant eu à moduler ma pratique professionnelle pour m'adapter à ce manque de réaction "positive".
Placer des activité périscolaires en journée bouleverse certes les habitudes établies... j'en conviens. Mais on peut établir un calendrier original, on doit faire preuve d'inventivité et d'imagination...
Faire en sorte qu'un même personnel de périscolaire intervienne un jour de la semaine en début d'après-midi dans une classe, puis en fin d'après-midi dans la classe voisine, on inverse pour le lendemain, on module les plages d'intervention plus longues et les plus courtes en fonction des projets, en fonction des actions proposées...
Il y a tant d'idées positives imaginables, il y a déjà dans diverses communes tant d'expériences riches d'organisations partagées au service des apprentissages. Puisons dans ce catalogue, prenons les idées qui émergent, élaborons nos propres schémas, en un mot, osons!
Certes le coût reste peut-être un frein, c'est certain et je ne peux le nier... L'accompagnement financier prévu ne suffira pas à couvrir toutes les dépenses. Certes travailler un mercredi est un bouleversement du temps de chacun, enfant, parent et enseignant...
Mais quand a été décrétée la suppression du samedi entraînant la fameuse semaine dite des "quatre jours", et donc une réduction des heures d'apprentissage, tout le monde ou presque s'est engouffré dans le système sans rien trouver à redire, sans lire la "petite ligne" qui laissait la possibilité de travailler le mercredi... On est bien conscient maintenant que cette réduction n'a pas été bénéfique.
Cette première étape d'étaler les heures d'enseignement est une bonne initiative, reste à réduire le temps des vacances, à repenser le contenu des programmes... tout ne se fait pas en un jour en France! Il faut en bousculer du monde accroché à ses petites habitudes, à son petit confort (me restent en travers les manifestations iniques des enseignants du primaire de la capitale, des nantis de première!)
Alors, oui, aujourd'hui, c'est une obligation... alors que ce soit en 2013 ou en 2014, le paysage n'aura pas changé, la terre tournera toujours dans le même sens!
Ce n'est que le début de la refondation de l'école, une première exigence qui dérange, qui bouscule. Depuis des mois la concertation est de mise, des sites dédiés, officiels ou non, ont été largement ouverts à tous ceux qui voulaient s'exprimer, des discussions ont eu lieu. Que ceux qui arguent qu'il n'y a pas eu concertation le démontrent.
On entend, "ça va trop vite, on n'a pas le temps, on n'est pas prêt"... mais tout est comme ça en France, tout prend du temps... même des choses simples se plaisent à "méandrer" entre arcanes administratives, études alibis, suspections d'illégitimité, délais de mise en place, reports de décision... on tergiverse, on ergote, on palabre, on gesticule, on discutaille, on chipote, on pinaille, on chicane, on biaise, on finasse, on louvoie, on temporise, on atermoie, on diffère, on proroge, on remet, on retarde, on reporte, on repousse, on tourne en rond, on laisse sous la pile, on ne sait jamais, au cas où ça changerait! En France, il est urgent d'attendre! "Attendre et voir", tout un programme!
Quant à la réduction des vacances scolaires, le sujet va encore certainement entraîner bien des polémiques de la part de lobbies de toutes sortes!
Un autre argument, celui des transports scolaires... j'ai du mal à comprendre... Le Conseil Général suivra, les circuits resteront en l'état, mais prendront en compte le mercredi, dès 2013, partout où c'est nécessaire.
Qu'entend-on aussi? Le raisonnement se basant sur la liberté pour les collectivités d'organiser ou non ce temps périscolaire, de faire payer les parents ou de le rendre gratuit... alors, de bien-pensants, sous prétexte d'une prétendue dimension sociale du sujet, opposent que c'est un accompagnement à deux vitesses, pour d'un côté les enfants dont les parents pourront payer, pour d'un autre côté ceux qui seront laissés pour compte!
Mais on marche sur la tête! Quel est ce genre de collectivité qui choisirait en priorité d'aménager des places de parking, des massifs de fleurs, de rénover des fontaines, de subventionner outre mesure des manifestations ponctuelles, d'engager des études coûteuses (et j'en passe)? Puis-je ajouter, au risque de créer polémique, que je me suis laissé dire qu'en certain coin de Meuse, des collectivités bénéficient de mannes exceptionnelles qui pourraient abonder de beaux projets éducatifs au service de nos jeunes... N'est-il pas "structurant" (puisque c'est le mot à la mode) de proposer à nos enfants de véritables moments éducatifs hors du temps scolaire?
Et si l'image de territoire rural que sait si bien se donner la Meuse, si cette image trouvait là une occasion de démontrer que la "ruralité" n'est pas qu'une terre où chacun parfois se replie sur ses compétences, n'est pas qu'un frein mais aussi une terre qui sait s'ouvrir à la modernité, à la prise en compte de tous et se change en une image de progrès social, proposé et pris en charge par tous? Dans tous les villages, on fait des efforts pour nos aînés, la vie associative est riche... changeons le regard que nous portons sur nos jeunes. Pourquoi ne pas imaginer que ce temps périscolaire puisse se prolonger en extrascolaire et porter un enjeu fort qui pourrait participer à prévenir ces conduites d'adolescents désœuvrés dans les rues de nos villages. C'est évidemment une autre histoire, mais pourquoi pas?
Pour terminer, j'ai plaisir à me remémorer une parole rafraîchissante et pleine de bon sens, prononcée à l'issue d'un débat complètement à charge, d'un parti pris d'une partialité confondante et dérangeante, mené par la Ligue de l'Enseignement de Moselle, de cet élu d'une commune du Pays Haut, : "On trouve bien de l'argent pour remplacer une conduite d'eau ou d'assainissement, on en trouvera pour nos gamins!"
Il est de notre devoir à tous, enseignants et élus, de relever ensemble ce beau défi, au travers d'un véritable engagement citoyen, afin de faire en sorte que chacun de nos petits Meusiens se construise, dans les meilleures conditions, la place qu'il mérite dans la société de demain.