Voici, en guise d'apéritif à la conférence sur le vélocipède qui aura lieu samedi à Bar le Duc, la copie d'un article de Ouest France daté du 25 mai 2011, sous le titre "Le vélocipède Michaux fête ses 150 ans".
Keizo KOBAYASHI paraît un spécialiste en la matière, qui suscitera sûrement l'intérêt de tous les amoureux de la petite reine, d'hier et d'aujourd'hui!
Le vélo est-il une invention française, comme le suggère l'association Paris Velocipedia (1) qui célèbre les « 150 ans du vélocipède » ? Pour ce club de passionnés, un brin chauvins, Paris est « le berceau mondial de la bicyclette ».
Pas si simple, nuance le japonais Keizo Kobayashi, qui a passé la moitié de sa vie à enquêter sur les origines de la « petite reine ». « Le vélo est européen, a-t-il tranché dans une thèse soutenue, en 1990, devant l'École pratique des hautes études. Il a été inventé par un Allemand, la pédale a été trouvée par un Français et le vélo moderne par un Anglais. »
Une draisienne en réparation
L'invention, survenue il y a un siècle et demi, à quelques pas des Champs-Élysées, est peut-être modeste, mais essentielle. « Un jour de 1861, raconte Keizo Kobayashi, un serrurier de la rue Rodier, Pierre Michaux, reçoit en réparation une draisienne (véhicule à deux roues alignées qu'on fait avancer en poussant le sol avec ses pieds). Le jour même, son fils Ernest, 19 ans, s'amuse avec et revient en disant : ' C'est fatigant d'avoir toujours les jambes levées ou par terre '. » Pierre Michaux lui propose de mettre un axe coudé sur la roue avant. La draisienne vient de gagner des pédales.
Mais, sans l'intuition géniale du Baron Carl von Drais, quarante-cinq ans plus tôt, il n'y aurait pas eu de vélocipède. C'est cet Allemand de Mannheim qui, ayant fixé deux roues, un guidon et une selle sur un cadre, avait eu la joie de constater que l'engin, équilibré par la force centrifuge, filait dans les descentes sans tomber.
Mort dans la misère
Dans les années qui suivent, l'artisan parisien développe son invention. 4 000 exemplaires du Vélocipède Michaux sortent de ses ateliers. Il s'associe à deux ingénieurs lyonnais, les frères Olivier, sans doute plus avisés que lui en affaires. Quelques fâcheries et un procès plus tard, Michaux se retrouve à la rue. Il meurt dans la misère le 9 janvier 1883. Avant de s'installer à Paris, il avait déjà connu la faillite à Saint-Brieuc. En Bretagne, il avait aussi trouvé une épouse, Marie de Cauret, qui lui a donné cinq enfants. Pour toute reconnaissance, Michaux a eu droit à un monument à sa mémoire, dans une rue de Bar-le-Duc (Meuse), où il était né en 1813.
Le vélo, lui, a poursuivi son chemin. Le spectaculaire et très casse-cou Grand-bi -avec sa grande roue avant -est vite supplanté par les premiers vélos à pédalier central et transmission arrière. L'Anglais Lawson lance sa « Bicyclette » à chaîne, en 1879. Un Nantais, Viarengo de Forville, le consul d'Italie, dépose aussi un brevet en 1874. Il ne manque plus que les pneumatiques gonflables de Dunlop, puis Michelin, pour que, vers 1888, le vélo ait atteint la maturité. « Depuis, ça n'a pas progressé fondamentalement », estime Keizo Kobayashi.
À 62 ans, l'érudit japonais n'en a pas terminé avec la machine qui a fait de lui un historien. Il va maintenant approfondir la période 1870-1900. « Je suis venu en France, en 1974, après avoir fait le tour du Japon à vélo, raconte-t-il. Je voulais savoir d'où venait cette joie de vivre que je ressentais en pédalant. Je n'ai pas trouvé la réponse, mais la question est devenue secondaire. Maintenant, ce sont mes recherches qui me passionnent. »