Un article du Nouvel Obs pointe du doigt un problème crucial rencontré par de nombreuses familles, le manque de places en crèches.
Intitulé "Crèches : ceux qui en ont le plus besoin en bénéficient le moins", il fait la synthèse d'un rapport avec dix propositions concrètes en direction des collectivités.
Les crèches pourraient être une arme efficace de lutte contre les inégalités, démontre le think tank Terra Nova. Problème : il n'y a pas assez de place pour les pauvres.
Avant même l'entrée en CP, la pauvreté a déjà des conséquences sur le développement linguistique et émotionnel de l'enfant : les futurs décrochages se jouent en partie dès la petite enfance, lorsque le cerveau connaît sa période de développement neuronal la plus importante. Des inégalités qui se répercutent tout au long de la vie, de la scolarité à l'insertion professionnelle.
Faire de la petite enfance une période charnière où l'action publique peut être la plus efficace et non le moment où les inégalités sociales se creusent, telle est la proposition majeure de Terra Nova. Parmi les 20% d’enfants les plus défavorisés du pays, seuls 8% bénéficient d’une place en crèche. Ces disparités s'amplifient pour les familles monoparentales : 71% des enfants de parent isolé sont gardés à la maison, contre 62 % des enfants de familles biparentales.
La capacité d'accueil varie ainsi de un à trois selon les départements. A l'intérieur d'une même région, les départements les plus pauvres sont souvent les moins bien dotés. De même entre les différentes communes, l'avantage va aux plus riches.
De plus, les horaires d’ouverture des crèches sont encore mal adaptés aux personnes exerçant plusieurs emplois ou travaillant à des horaires atypiques.
Trop de crèches avantagent en outre les familles dont les deux parents travaillent, poursuit le rapport : deux tiers des établissements qui prennent en compte leur situation professionnelle favorisent les couples "bi-actifs".
L’arbitrage financier entre le salaire de la mère (dans la majorité des cas ouvrière ou employée) et le coût de la garde ne joue pas en faveur d’une poursuite de l’activité.
Terra Nova propose donc d'augmenter de façon importante le nombre de crèches et d'en faire des lieux de haute qualité éducative. ce qui permettrait "de réduire significativement les inégalités dans notre pays". La mesure serait même plus économique que de lutter en aval contre le décrochage scolaire, à l'adolescence : "Selon le prix Nobel d’économie James Heckman […] il s’agit de l’investissement éducatif le plus 'rentable' pour la société", écrit Terra Nova.
Si "les crèches sont un besoin important pour toutes les familles, pour les enfants pauvres, elles peuvent changer le cours d’une vie", estiment en effet les auteurs du texte. Pour l'heure, "nos crèches sont encore trop peu conçues comme des lieux d’éducation." Les personnels concentrent surtout leurs efforts sur les aspects sanitaires et de sécurité, ainsi que sur le développement psycho-moteur et la sociabilité, mais négligent le langage, affirme Terra Nova.
De quoi alimenter les cahiers de campagne et les programmes électoraux ces prochains mois...