Je reprends ici le rapport d'information de M. Claude BELOT, fait au Sénat le 16 février 2011 au nom de la Délégation aux collectivités territoriales qui met le doigt sur un des poisons qui minent les collectivités locales, celui qui consiste à devoir appliquer les normes, toujours plus nombreuses, toujours plus contraignantes et évidemment, comme vous vous en doutez, toujours plus coûteuses pour les finances de nos communes ou communautés de communes.
A quoi sert donc l'établissement de cette ribambelles de normes, décrétées à tort et à travers? à un nouveau bien-être de nous tous, nous concitoyens qui crachons toujours plus au bassinet?
Bien sûr, me direz-vous, cela stimule l'ingéniosité de nos industriels... cela fait l'affaire des éditeurs qui éditent catalogues et fascicules de complément.... cela remplit les placards de produits devenus inutilisables et fatalement destinés au pilon de nos déchetteries... cela fait le bonheur des organismes qui attestent du bien-suivi de ces nouvelles législations... cela crée de nouveaux emplois (?)...
De la gestion de l'eau à la sécurité des bâtiments, des transports aux équipements sportifs, de la voirie à la restauration scolaire, la quasi-totalité des domaines d'intervention des collectivités territoriales sont aujourd'hui impactés par l'inflation normative.
Dans une société inquiète, voire angoissée, à la recherche du « zéro risque absolu », la norme a vite colonisé tous les secteurs de la sphère publique. Pour chaque question, pour chaque éventualité, pour chaque doute, la réponse est la même : légiférer ou règlementer. L'obligation ou l'interdiction, selon les cas, surgit, tel un réflexe conditionné ; elle s'impose dans son uniformité, sa rigidité et parfois son absurdité au responsable local, où qu'il soit et quelles que soient les circonstances locales.
La norme s'impose aussi dans ses excès à un citoyen qu'elle est pourtant censée servir et protéger. Au-delà de leurs effets (souvent astronomiques) sur le contribuable local, ce sont les organes vitaux de la démocratie que frappent les quelque 400 000 prescriptions techniques aujourd'hui applicables aux collectivités territoriales : le droit, ravagé dans sa crédibilité et son autorité ; la sécurité juridique, victime directe d'une frénésie textuelle devenue chronique ; et, surtout, l'élu local, fonctionnarisé, parfois infantilisé.
Sans tomber dans une « normophobie » qui serait tout aussi vide de sens que l'idolâtrie de la règle, la Délégation du Sénat aux collectivités territoriales et à la décentralisation a estimé qu'il était grand temps de recentrer la norme sur sa raison d'être : le service d'intérêts publics. Sous la plume de son président, Claude BELOT, elle émet une vingtaine de propositions pour en finir avec une nouvelle forme de jacobinisme : le centralisme normatif, qui transforme l'élu en administrateur, substitue l'expertise technique à la légitimité des urnes et change la gestion par l'action en gestion par l'intendance.