Pour ceux qui ont relevé le défi...
"Ecrire… c’est prendre un crayon et poser sur le papier des lettres, des mots… c’est souvent une épreuve. Comme le petit qui apprend la vie et, comme les adultes qui l’entourent, il signe son dessin avec un gribouillis. Il sait, sans en avoir conscience, qu’il doit pour exister à côté de son petit copain, il sent instinctivement que l’originalité de son dessin ne suffit pas.
Et dans ce gribouillis, il y a tout son cœur, il y a tout son amour, dans ce gribouillis il met tout de lui…
Mais si la maîtresse sait reconnaître son dessin, car une maîtresse, ça reconnaît tout, plus tard, il se rend compte, petit à petit, que les autres ne savent pas, sont indifférents à ce morceau de lui-même qu’il a pourtant mis tant de cœur à déposer sur le papier. Alors, ces signes, cette signature, cela serait donc une marque de reconnaissance, une preuve de son identité ?
Et dans l’esprit de l’enfant naît un désir, celui de communiquer d’une autre façon. Dans un apprentissage structuré, s’enchaînent alors l’association de sons et de signes, la découverte des mots pour la découverte d’une autre relation, celle de l’écrit.
Commence dès lors un chemin semé d’embûches. Car il faut compter avec soi-même, avec toute sa perception du monde, avec le regard des autres, avec ses propres repères façonnés d’une manière différente pour chaque individu.
Quand tout va bien, quand aucun grain de sable ne vient gripper les délicats engrenages de la mise en place du monde merveilleux de l’écrit, on ne se pose aucune question, on écrit, tout simplement.
Mais il est d’autres circonstances où les aléas de la vie en ont décidé autrement.
Alors les obstacles se multiplient, prenant un malin plaisir à contrer le désir et l’envie. On a pourtant des tas de choses à dire, des histoires à raconter.
Ce courage d’affronter cet ennemi, il faut l’avoir ! Il faut prendre sur soi, il faut aller chercher au plus profond de son être ces petits mécanismes rouillés et leur redonner vie ! Des moments d’efforts, des passages à vide, des reprises d’espoir… et enfin, on peut, on réussit, on couche sur le papier ces mots magiques qui racontent, qui disent, qui parlent, qui questionnent, qui font la vie ! Se prouver à soi-même que l’on a pu, prouver aux autres que l’on sait, quelle belle bataille ! Et quelle belle victoire !
Et le challenge est le même, quand d’une langue maternelle écrite et parlée, il faut mouler tout son être dans de nouvelles relations, dans un nouveau pays, dans une nouvelle vie. Un autre à connaître, des relations à nouer, une langue à réinventer, des mots à « sortir » pour se faire comprendre, bien souvent de nouveaux signes pour de nouvelles lettres. La tâche est rude car on a laissé là-bas une partie de soi-même et il faut tout reconstruire, réapprendre à vivre autrement.
J’ai vu des petits arriver de pays en guerre se couler avec aisance dans le costume du petit français, aidés par la candeur de la jeunesse. J’ai vu des parents désireux plus que tout de se rebâtir un monde nouveau.
Mais j’en ai vu d’autres englués de lourds souvenirs, peinant à se faire une place parmi nous, pas toujours aidés dans cette nouvelle vie à réinventer.
Les défis de l’écriture, c’est ce challenge que vous tous ici avez relevé, au prix d’efforts remarquables pour une réussite dans pareille.
Votre rêve d’enfant a pris corps… et même les absents d’aujourd’hui, ceux qui ne peuvent vous écouter, pourront vous lire et connaître ce rêve, grâce à l’acharnement que vous avez mis à le poser, tel un délicat trésor, sur une simple feuille de papier ! Mais quelle feuille ! Une feuille témoin, un gage de votre réussite à surmonter ces obstacles que vous pensiez infranchissables !
Bravo à vous tous !
Je n’oublie pas tous les bénévoles qui vous ont aidés, encouragés tout au long de ce beau chemin vers l’écriture !
A vous tous merci."